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Pour Guillaume Puech « Les valeurs moyennes n’ont pas fait mieux que le CAC 40 dans la panique, mais ont davantage rebondi depuis six semaines »

Les valeurs moyennes sont réputées pour leur capacité de résistance aux chocs boursiers. Guillaume Puech, gérant Small & Mid Caps chez La Financière de l’Echiquier, nous explique comment elles se sont comportées en pleine crise financière. 

Les valeurs moyennes ont-elles mieux résisté au choc boursier que les grandes capitalisations ? Pour quelles raisons ?

En tout premier lieu, chaque maison ayant sa propre définition, « La Financière de l’Echiquier » investit dans des valeurs moyennes européennes dont les capitalisations sont comprises entre 500 millions et 5 milliards d’euros. L’exposition aux valeurs françaises de nos deux fonds dédiés à la classe d’actifs est de l’ordre de 20%.

Ceci étant dit, entre le 18 février, qui correspond au point haut du marché, et le 18 mars, au point bas, nous avons assisté à une baisse généralisée de toutes les classes d’actifs au point près, partout en Europe. De manière étonnante, tous les indices représentant tous les compartiments de la cote, du CAC 40 au SBF120 en passant par le CAC Mid ans Small, ont cédé entre 38 et 40% sur ce mois glissant.

Les valeurs moyennes, réputées pour leur capacité de résistance, en raison d’une liquidité moins forte, d’un actionnariat plus solide notamment, n’ont pas fait mieux cette fois-ci.

Cette vente généralisée de toutes les classes d’actifs s’est opérée indépendamment de la valeur des sociétés. Dans un réflexe de panique, les investisseurs se sont séparés d’actifs qui pouvaient perdre jusqu’à 60% de leurs valeurs selon certains experts.

Ce mouvement a été accentué par des rachats massifs du côté des clients particuliers qui ont engendré des ventes forcées sur les titres. Nos fonds de valeurs moyennes n’ont heureusement pas subi de flux négatifs, la collecte est même positive sur cette classe d’actifs depuis le début de l’année.

En revanche, après ce vent de panique, les valeurs moyennes ont davantage rebondi depuis six semaines que les grandes capitalisations, une surperformance de l’ordre de 3 à 4 points. Les investisseurs rassérénés par les interventions des banques centrales ont pris le temps de regarder de près les baisses et de séparer le bon grain de l’ivraie. Le tri s’est opéré en trois cas : les sociétés dont les pertes de chiffre d’affaires ne seront pas remplacées (tourisme, événementiel…), les entreprises qui subissent un décalage de chiffre d’affaires (medtechs….), et enfin celles qui ont profité de la crise sanitaire (santé, jeux vidéo, home delivery…).

Les valeurs moyennes cumulent les atouts : plus agiles, elles évoluent sur des marchés de niche, sont capables de gagner des parts de marché, de capturer la croissance. Elles sont aussi moins corrélées aux grands enjeux mondiaux, leur flottant est plus petit, elles ont les moyens de procéder à des acquisitions….

Ce segment offre de belles opportunités, et certains titres ont déjà comblé l’essentiel de leur baisse (Neoen…). Dans des conditions de marché aussi difficiles, il est important d’avoir une connaissance approfondie des dossiers en amont pour pouvoir sélectionner les valeurs en capacité de générer de la performance. Nous avons procédé de deux manières, en renforçant nos positions sur certains titres déjà en portefeuille (Worldline….) et en initiant des positions sur des titres dont la valorisation était jusqu’alors trop élevée.

Quelles sont les secteurs et valeurs que vous privilégiez aujourd’hui ?

Les valeurs de la santé, d’autant que la crise sanitaire aura pour effet de redonner des moyens financiers au secteur, et a aussi mis en avant la nécessité de relocaliser la production de médicaments.

L’une de nos plus fortes convictions est Sartorius Stedim qui produit des consommables médicaux, et détient des positions de leader sur des marchés de niche. Nous avons investi dans cette valeur peu après son introduction en Bourse en 1994.

Nous avons aussi renforcé nos positions sur Biomérieux dont le cours avait baissé. Les solutions de diagnostic constituent un enjeu majeur aujourd’hui dans la lutte contre la propagation du coronavirus. 

Enfin, je citerais le secteur du digital. Les grands acteurs américains s’en sortent notamment très bien . Ce succès va redonner un coup de fouet à l’ensemble des sociétés, notamment celles dont les produits ou les services de rupture vont changer nos modes de consommation.

Deux exemples : le suédois Storytel qui édite des livres audio et connaît une croissance de son chiffre d’affaires de 40% par an environ, et HelloFresh, société de restauration allemande qui produit des kits de repas et connaît actuellement ses plus hauts historiques, + 100% depuis le début de l’année.

Enfin, les énergies renouvelables concentrent beaucoup d’enjeux, de la construction et l’exploitation de fermes éoliennes à l’installation de pompes à chaleur. Il existe de nombreux acteurs sur ces niches en Scandinavie.