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Bail réel solidaire : du neuf à prix bradé, mais pas pour tout le monde !

Plusieurs promoteurs commercialisent actuellement des programmes immobiliers permettant de devenir propriétaire d’un logement neuf de qualité, bien situé et de 30 à 50 % moins cher. Reste que le stock est limité et nombre d’acheteurs n’y trouveront pas leur compte.

Taxe foncière
Crédit: iStock.

Comme dans l’ancien, l’inflation n’a pas épargné le neuf. Selon Le Laboratoire de l’immobilier, le prix du mètre carré neuf atteint désormais 4 821 euros en moyenne dans l’Hexagone, Paris explosant les compteurs avec 12 090 euros (chiffres 2020). Des niveaux qui rendent difficile, voire impossible, l’accession à la propriété pour nombre de ménages. Face à ce constat, des opérations immobilières d’un genre de nouveau se multiplient un peu partout en France, là où le marché est tendu. Elles sont basées sur un dispositif inédit : le bail réel solidaire (BRS).

L’accès à du neuf à prix (très) attractif

Le bail réel solidaire est en fait une nouvelle forme de droit de propriété, introduite par la loi Macron du 6 août 2015 (art 94 loi n°2015-990), qui permet de dissocier le bâti et le terrain. Concrètement, l’acheteur devient propriétaire des murs de son logement, mais pas du terrain sur lequel il est construit. Ce dernier reste la propriété d’un Organisme de foncier solidaire (OFS). Ces nouvelles entités à but non lucratif peuvent être créées par une coopérative, un bailleur HLM… ou encore une municipalité comme la ville de Lille, première commune à avoir lancé son OFS en 2017.

Grâce à cette dissociation, le coût global d’un appartement baisse considérablement, car le foncier est très élevé dans la plupart des communes. L’économie s’élève en général à 30 % et parfois jusqu’à 50 % et plus. A Paris, par exemple, la première opération BRS, réalisée dans le 14e arrondissement au sein du projet Saint-Vincent-de-Paul, propose des appartements à 5 175 euros TTC. A titre de comparaison, dans le quartier, les programmes neufs traditionnels en cours de commercialisation dépassent les 14 000 euros le mètre carré (programme Spring Garden de Soferim notamment).

Outre le prix, le dispositif du bail réel solidaire offre des atouts certains pour les acheteurs. D’abord, il s’agit d’un droit réel : le logement peut être hypothéqué, vendu ou transmis à des héritiers. Ensuite, il ouvre les mêmes coups de pouce financiers que pour une acquisition classique : TVA à 5,5 % et prêt à taux zéro. D’un point de vue patrimonial, la valeur du logement est garantie dans le temps puisque le bail qui porte sur le terrain est rechargeable à chaque mutation. Tout nouvel acquéreur repart avec un contrat identique (bail de 99 ans maximum).

Des contraintes à ne pas négliger

Cependant, il convient de garder en tête les contraintes d’une telle opération. En premier lieu, la double barrière à l’entrée. Il faut, en effet, respecter les plafonds de ressources du PSLA (prêt social location accession). Soit pour 2021, pour un couple sans enfant, 45 586 euros annuels en zone A (32 914 euros en zone B et C). S’y rajoute la sélection opérée par les municipalités. Il faut impérativement déjà habiter ou travailler dans la commune. D’autres critères s’appliquent ensuite. A Paris, une grille de cotation déterminera les candidats admis à passer en commission de sélection finale. Globalement, les candidats visés par les opérations BRS sont en priorité les jeunes ménages et les actifs (couples ou familles).

Viennent ensuite les contraintes liées au dispositif lui-même. En plus de la mensualité d’emprunt, l’acquéreur devra s’acquitter d’une redevance mensuelle correspondant à la location du terrain. Son montant est variable selon les communes, de 1 à 5 euros/mètre carré/mois. A Paris, elle est ainsi fixée à 2,50 euros, soit par exemple 150 euros par mois pour un 60 mètres carrés. Cette redevance peut limiter, selon les communes, l’avantage financier par rapport à une acquisition classique sur le marché libre. Selon une étude du Cerema, au Kremlin-Bicêtre en région parisienne, par exemple, l’écart de mensualités entre BRS et accession libre hors redevance est de 30 %, mais passe à 11 % en intégrant la redevance.

La sortie constitue également un point négatif. S’il est possible de vendre son logement à tout moment, le nouvel acquéreur doit obligatoirement respecter les plafonds de ressources PSLA. Y compris dans le cas d’une transmission successorale à ses héritiers. Par ailleurs, impossible de réaliser une plus-value foncière, contrairement au dispositif PSLA. Le BRS a été conçu comme un outil anti-spéculation. La vente se fera donc au prix initial majoré simplement de l’indice IRL pour tenir compte de l’inflation dans la plupart des cas.

Certains OFS peuvent toutefois prévoir une clause qui n’empêche pas la plus-value mais l’encadre, comme l’OFS La Foncière 74 qui commercialise des programmes en Haute-Savoie avec le promoteur Icade. Une formule de calcul a été mise en place qui tient compte de l’évolution du marché immobilier local. Enfin, puisque le logement doit uniquement être occupé à titre de résidence principale, il n’est pas possible de le louer et d’en tirer des revenus.

Où acheter en bail réel solidaire ?

52 OFS sont actuellement agréés partout en France. Selon la toute nouvelle association Foncier solidaire de France, plus de 9 200 logements seront livrés en BRS en 2024. Un nombre limité au regard des ventes annuelles dans le neuf (128 000 en 2020). Pour postuler, il faut s’adresser directement soit à l’OFS soit au promoteur qui commercialise le programme. Voici quelques exemples de logements BRS disponibles actuellement à la vente.

A Lille, 17 appartements BRS du T2 au T5 sont commercialisés dans le cadre de l’opération Carré Latin en plein cœur du quartier Saint-Michel. Prix au m2 TTC : 2 215 euros. En région parisienne, à Bry-sur-Marne, 38 logements en BRS du studio au 5 pièces sont mis en vente par MDH Promotion à 3 800 euros. En Haute-Savoie, l’OFS Erilia a lancé à Cranves-Sales près d’Annemasse, de la Suisse et du lac Léman, l’opération L’Opale de 12 appartements, du T2 au T5 avec garages boxés, à -25 % par rapport au prix du marché. Enfin, à Saint-Malo, l’OFS le Foncier Coopératif Malouin commercialise dans un éco-quartier proche de la gare et du centre-ville le programme Les Préaux. Celui-ci est composé de 11 villas, 10 maisons-appartements et 16 appartements en BRS (maisons à 194 000 euros, appartements T4 à 179 500 euros).