Airbnb : la fiche H2, bête noire de la mairie de Paris
L’objectif ? Encadrer la location des logements proposés via la plateforme Airbnb dans la capitale. Mais les amendes proposées sont difficilement applicables.

Deux lettres qui constituent pour la mairie de Paris un véritable casse-tête : H2. A l’origine de cette fiche, une décision rendue par la Cour de cassation en février 2021. L’objectif ? Encadrer la location des logements proposés via la plateforme Airbnb dans la capitale (pas plus de 120 jours de location par an et demander un accord de la mairie si c’est le cas ou qu’il s’agit d’une résidence secondaire). Cet arsenal, jugé légal, a grisé la mairie de Paris qui anticipait la victoire au procès qui l’opposait à plus de 400 propriétaires louant illégalement leur résidence secondaire, risquant ainsi d’être amendés à hauteur maximale de 50.000 euros (article L651-2 du code de la construction et de l’habitation). Mais la prémonition n’a pas été exacte, explique Le Figaro Immo.
Car dans les faits, appliquer de telles amendes relève de l’impossible. La Ville doit ainsi prouver qu’au 1er janvier 1970 le bien incriminé était alors un local d’habitation. Et non après cette date comme le stipule la loi dans l’article L631-7 du code de la construction et de l’habitation. « Cette preuve est indispensable pour faire condamner le propriétaire qui s’adonnerait sans autorisation à la location de type Airbnb », précise Maître Valentin Simonnet, avocat chez STAS & Associés. Cependant, le document « ne comporte pas toujours les mentions sollicitées par le juge, à savoir le nom de l’occupant, le loyer versé au 1er janvier 1970 et la date d’entrée dans les lieux », souligne Me Xavier Demeuzoy, fondateur du cabinet Demeuzoy Avocats.
Un processus de longue haleine qui « a mis en panique les avocats de la mairie lorsque mes clients ont gagné en première instance », glisse auprès de nos confrères l’avocat d’un propriétaire. Ils ont ainsi saisi une opportunité produisant un résultat mitigé. « Sur 80 dossiers environ, j’ai obtenu 90% de victoires en première instance. Je viens d’obtenir ma première victoire sur un dossier où la mairie avait fait appel », explique l’avocate au barreau de Paris Lorène Derhy, qui défend, sur ce dossier en appel, le propriétaire d’un 14 m² à Montmartre (Paris 18e) qui a obtenu près de 3000 euros de remboursement de frais.
Airbnb face à l’illisibilité
« Des mentions raturées, des fiches H2 ni datées ni signées ou une identification de lots illisible peuvent suffire pour obtenir gain de cause contre la mairie », ajoute Me Demeuzoy. Pour environ 75 des 150 dossiers qu’il défend, il a obtenu que la mairie de la capitale soit déboutée de sa demande d’amende à hauteur de 50.000 euros. Et ce, grâce à l’absence d’eau. « Le logement est dépourvu de salle d’eau et de wc et ne dispose pas de l’eau courante, ce qui contredit l’usage d’habitation », a estimé la Cour d’appel de Paris. Elle a ainsi donné raison au propriétaire mis en cause.
Mais quid pour l’avenir de ces cas devant la loi ? «Je devine raisonnablement que tous les dossiers où la mairie de Paris rapporte une fiche H2 qui ne mentionne pas de loyer au 1er janvier 1970, seront gagnés par les parties adverses si la mairie n’apporte pas de preuves complémentaires pour rapporter l’usage d’habitation du local qu’elle vise à cette date impérative », assure Lorène Derhy. Et les propriétaires qui ont obtenu gain de cause pourraient également remettre à la location leur résidence secondaire « car ils pourraient invoquer le principe “d’autorité de la chose jugée”. Mais je leur conseille d’attendre de savoir si la mairie se pourvoit en cassation. », réplique Me Romain Rossi-Landi. Lui, avait obtenu gain de cause dans dix-huit dossiers sur une vingtaine défendus.