Immobilier : fin annoncée de la parenthèse enchantée

Taux d’intérêt planchers maintenus, hausse des prix modérée, ventes records… C’est une parenthèse enchantée que semble avoir connue le marché immobilier depuis l’édition 2016 du guide de l’immobilier de Mieux Vivre Votre Argent. Après une longue période de vache maigre, la pierre a repris des couleurs l’année dernière dans la plupart des villes.
Leur éclat ne s’est pas démenti ces douze derniers mois, au grand bonheur des professionnels! Le nombre de réservations dans le neuf a bondi de 12,4 % et celui des mises en vente, de 5,5 %, selon la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI).
Tous logements confondus, un nouvel exploit annuel du nombre de transactions a été franchi à la fin du mois de juin avec 900 000 ventes signées, selon la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim). Côté prix à l’échelle nationale, les appartements et les maisons dans l’ancien ont respectivement progressé de 4,4 % et 3,4 % sur un an, selon l’indice de la Fnaim. Derrière cette courbe ascendante se cachent toutefois de fortes disparités territoriales.
Dans la capitale, « marquée par le grand retour des acheteurs étrangers », les prix ont flambé sans discontinuer, explique Philippe Taboret, directeur général adjoint de Cafpi et président de l’Association professionnelle des intermédiaires en crédit (Apic).
Entre le deuxième trimestre 2016 et le deuxième trimestre 2017, le marché a enregistré une croissance de 6,6 %, à 8 670 euros le mètre carré, d’après les données de la Chambre des Notaires de Paris. Une tendance à la surchauffe qui s’est propagée au-delà du périphérique : en Région parisienne, les prix au mètre carré médian des appartements ont atteint 5640 euros, en augmentation de 5,2 %.
En dehors de l’Ile-de-France, on observe le même phénomène inflationniste dans la majorité des métropoles. Mais, à l’exception des cas très particuliers de Bordeaux – où les prix ont explosé –, de Lille et de Nantes, les progressions restent plus modérées qu’en Ile-de-France, dépassant rarement 3 %. A contrario, près d’un tiers des communes observées ont affiché une baisse des prix, laquelle est particulièrement forte à Ajaccio, Dijon et Limoges.
Baisse du pouvoir d’achat immobilier
En matière de conditions d’emprunt, les acquéreurs ont pu bénéficier ces douze derniers mois de taux d’intérêt toujours très bas, avec un plancher « historique » en novembre dernier (1 % sur vingt ans et 1,25 % sur vingt-cinq ans chez Cafpi).
Il s’en est ensuivi une remontée très légère entre le mois de décembre et le printemps 2017, qui a vite laissé place à une stabilisation que la majorité des courtiers prévoient durable. En octobre 2017, les taux les plus compétitifs relevés par les courtiers atteignaient 1,50 % sur vingt ans et 1,70 % chez VousFinancer, 1,31 % sur vingt ans et 1,51 % sur vingt-cinq ans chez Cafpi et MeilleurTaux.
Dans ce contexte, la production de nouveaux prêts à l’habitat a crû de 50 % sur un an. Jusqu’au printemps, la part des crédits renégociés représentait plus de la moitié de la production, mais elle est, depuis cet été, retombée à 30 %.
Entre taux bas et hausse modérée des prix, la capacité d’emprunt moyenne pour une mensualité de crédit de 1000 euros est passée de 205272 euros en octobre 2016 à 204301 euros en septembre 2017, selon MeilleurTaux.
Le nombre de mètres carrés qu’il est possible d’acquérir pour 1000 euros de mensualités en septembre 2017 par rapport à la même période en 2016 a évolué différemment selon les villes. Si, au Havre, il est possible d’acheter un bien d’une surface moyenne de 107 mètres carrés équivalente par rapport à l’année dernière, le pouvoir d’achat immobilier a été entamé en moyenne de 2 mètres carrés à Paris (23 contre 25), de 5 à Marseille (76 contre 81), et de 6 mètres carrés à Rennes (71 contre 77).
Fléchissement des transactions depuis cet été
Ce pouvoir d’achat pourrait-il encore se réduire dans les mois à venir ? Ces toutes dernières semaines, le marché a montré des premiers signes de ralentissement. Traditionnellement calme, la période estivale n’a pas affecté la valorisation des prix immobiliers, qui s’est accélérée.
En revanche, le volume des transactions s’est réduit, accusant une baisse de 20 % en septembre par rapport au mois de juillet, selon les derniers chiffres du baromètre de l’Observatoire LPI-SeLoger. Son porte-parole, l’économiste Michel Mouillart, note, en outre, que « le recul des ventes des logements s’accompagne d’une baisse de la production des crédits immobiliers destinés à l’ancien ».
Toutefois, tempère-t-il, « deux points méritent d’être soulignés. Tout d’abord, le repli estival des ventes est moins marqué qu’au cours des dernières années (20 % contre 25, voire 30 %). D’autre part, le rythme de progression annuel des ventes des logements (+ 7,4 %) aurait plutôt tendance à se stabiliser. »
Par ailleurs, un certain nombre d’acquéreurs, particulièrement les investisseurs, ont repoussé de quelques mois leurs projets en attendant d’être fixés sur le contenu des prochaines lois de finances et logement en préparation.
Dans cet environnement, le fléchissement de la demande pourrait n’être que provisoire. « Le volume de transactions de cette année montre que nombre de biens sont disponibles sur le marché, laissant aux accédants des marges de négociations appréciables […] et les banques restent prêteuses », estime, de son côté, Philippe Taboret. Avec des taux de crédit qui ne devraient que peu évoluer, le maintien annoncé (pour partie) des dispositifs Pinel et PTZ, deux importants moteurs de l’immobilier français, l’activité pourrait donc reprendre de plus belle en 2018… à condition que les prix ne s’emballent pas trop. Chez MeilleursAgents, on anticipe un marché « sain, orienté vers des hausses lentes et progressives des prix, sans excès, spéculation ou effet pervers, d’environ 2 % sur les douze prochains mois ».