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Location meublée professionnelle : cette mesure qui change la donne

déménagement

Crédit : iStock.

Par une simple mise à jour des régimes applicables, la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2021, publiée au Journal officiel, a-t-elle involontairement porté un coup au statut de loueur en meublé ? Ce texte a entériné la suppression actée par le Conseil constitutionnel en février 2018, de l’une des conditions qui distinguait le LMP du loueur en meublé non professionnel (LMNP) : l’inscription au registre du commerce et des sociétés (RCS), qui déclenchait automatiquement l’assujettissement aux cotisations sociales. Auparavant, seuls ceux qui y étaient inscrits devaient s’affilier, et ce critère suffisait souvent à distinguer l’activité de LMP ou LMNP. « Les loueurs avaient la possibilité d’opter pour l’un ou l’autre, aujourd’hui, ils ont moins la main dessus », commente Yves Bernard, président d’Expertim.

Ces récents changements font donc que désormais, sont considérés comme LMP, au sens de l’impôt sur le revenu, les loueurs réunissant les deux conditions suivantes :

• Les recettes annuelles tirées de la location meublée par le foyer fiscal doivent être supérieures à 23.000 euros ;

• Ces recettes doivent être supérieures à la somme des revenus professionnels du foyer fiscal soumis à l’impôt sur le revenu.

Bascule automatique

Mais cette clarification du régime, alignant le plan fiscal et le plan social, a un effet pas forcément désirable pour tous. Il aboutit en effet à assujettir aux cotisations sociales des travailleurs non salariés (TNS) l’ensemble des loueurs en meublé professionnel (LMP). C’est-à-dire faire basculer automatiquement « ceux qui retirent de l’activité de location meublée des recettes annuelles supérieures à 23.000 euros et dont ces recettes excèdent leurs autres revenus d’activité », explique Maud Velter, cofondatrice du site jedeclaremonmeuble.com. Sont aussi soumis aux cotisations sociales les loueurs de meublés touristiques, de type Airbnb, dont les recettes annuelles excèdent 23.000 euros avec possibilité de s’affilier au régime général de la Sécurité sociale si leurs recettes sont inférieures à 76.200 euros (au lieu de 85.800 euros jusqu’à présent).

En résumé, « on revient d’une certaine façon à la situation antérieure. Celui qui est LMP doit s’affilier au régime des indépendants, sauf que de nombreux propriétaires n’ont pas conscience d’être professionnel et leur statut peut changer d’une année sur l’autre », selon Maud Velter. En effet, des loueurs non professionnels pourraient y perdre des plumes. Particulièrement ceux dont les revenus du foyer fluctuent d’une année sur l’autre, qui prennent une année sabbatique, divorcent, voire dont l’un des membre décède, etc., peuvent soudainement être considérés comme professionnels.

Quelles conséquences financières ?

Les taux de cotisations sociales étant variables et dégressifs, il est faux de dire que dans l’ensemble, tout le monde en sort perdant. »Le dispositif n’est pas inintéressant pour les très gros loueurs en meublé, dont les recettes dépassent les plafonds de la Sécurité sociale ». En revanche, les « petits », c’est-à-dire ayant « des revenus proches des 23.000 euros et dégageant des bénéfices peu élevés, risquent d’être pénalisés », selon Rania Ihaddadene, consultante chez Fidroit. Autre problème : en cas d’activité non bénéficiaire, un forfait minimum de cotisations sociales de 1.145 euros est prélevé par la Sécurité sociale des indépendants (SSI, ex-RSI), donnant des droits à la retraite.

Attention aussi à la revente du bien immobilier : « Les plus-values seront taxées au régime des plus-values professionnelles en LMP, tandis que c’est le régime des plus-values immobilières des particuliers, avec abattements et exonération au bout de 30 ans qui s’applique en matière de LMNP », ajoute Rania Ihaddadene. Quoi qu’il en soit, cotiser à la SSI donne accès à une couverture sociale, qui était parfois négligée jusqu’ici. Et côté retraite, la SSI permet de valider trois trimestres par an.

Décret à venir

A défaut de précisions dans la LFSS sur leur entrée en vigueur, ces modifications s’appliqueraient au 1er janvier 2021. Et non pas, de manière rétroactive, aux revenus 2020. Un décret est toutefois attendu, permettant d’éclaircir ce point. Au passage, il pourrait lever quelques autres zones d’ombre, notamment le cas de la détention du bien par plusieurs personnes. Enfin, une porte de sortie pourrait voir le jour : les locations effectuées par le biais de personnes morales, c’est-à-dire des sociétés, pourraient être exemptes de cotisations sociales.

Si la société civile immobilière (SCI) n’est pas forcément le bon moyen d’investir en LMP – la location meublée est fiscalement considérée comme une activité commerciale, ce qui incompatible avec ce type de structure, exerçant une activité civile même si elle peut opter pour l’impôt sur les sociétés (IS) – la SARL de famille pourrait y gagner. « Ce véhicule pourrait retrouver un regain d’intérêt », émet le président d’Expertim.

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