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Voici ce que la loi Pacte va changer pour les épargnants

Votée après de longs débats, la loi Pacte prévoit de nombreuses mesures concernant l’épargne retraite, l’assurance vie, le plan d’épargne en actions et l’épargne salariale.

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Crédit: iStock.

Après des mois de discussions, la loi Pacte (Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises) a définitivement été adoptée le 11 avril dernier. S’il faudra encore attendre l’aval du Conseil constitutionnel puis la parution dans les prochains mois des décrets et ordonnances pour connaître tous ses détails pratiques, ce texte va significativement modifier le paysage de votre épargne. Panorama des principales mesures.

Plan d’épargne retraite : une réforme d’envergure

Rendre l’épargne retraite plus attractive, plus performante et, surtout, plus simple d’utilisation, telles sont les ambitions affichées de la loi Pacte. Dans ce cadre, le Gouvernement a créé le PER (plan d’épargne retraite), dont l’objectif est de réunir les enveloppes existantes : les Perp (plan d’épargne retraite populaire) et les contrats Madelin, souscrits à titre individuel ; les Perco (plans d’épargne pour la retraite collectifs) et contrats retraite article 83, proposés en entreprise.

Les règles de tous ces contrats seront harmonisées en termes de fiscalité (notamment la possibilité de déduire les versements des revenus imposables) ou encore de fonctionnement. La gestion pilotée, qui consiste à investir votre épargne en fonction de votre horizon de temps, sera appliquée par défaut. L’option de réversion de la rente viagère pour le conjoint (en cas de décès du titulaire du produit) sera également généralisée à tous les dispositifs.

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Autre nouveauté: les conditions de sortie de l’épargne retraite seront assouplies. Il en sera ainsi des déblocages anticipés, élargis par exemple à l’acquisition de la résidence principale. Enfin, les épargnants auront plus de liberté pour choisir entre une sortie en rente ou en capital pour leurs versements volontaires, mais aussi pour ceux issus de l’intéressement ou de la participation. Le Gouvernement sera toutefois plus généreux en avantages fiscaux en cas de sortie en rente.

Assurance vie: transférabilité et transparence

La loi Pacte s’est aussi attaquée à l’assurance vie. Premier champ de bataille du Gouvernement: moderniser les fonds euro-croissance, produits hybrides entre le fonds en euros et les unités de compte dont le capital n’est garanti qu’à partir de huit ans de détention, en rendant plus lisible leur formule de revalorisation.

Autre bonne nouvelle pour les épargnants, la transférabilité partielle des contrats d’assurance vie a été actée. Un vieux contrat pourra être transféré vers un produit plus compétitif d’un même assureur sans perdre l’antériorité fiscale. Une petite avancée par rapport à l’amendement Fourgous de 2005 qui permet aux épargnants détenteurs de contrats monosupports de les transférer uniquement vers un contrat multisupport au sein d’un même assureur sans pénalité fiscale, à condition d’investir au minimum 20% de ses avoirs sur des placements à risque.

Pour booster son nouveau produit retraite, le Gouvernement donnera la possibilité, jusqu’à la fin de 2022, au détenteur de contrats d’assurance vie de plus de huit ans, et ayant encore plus de cinq ans devant eux avant leur retraite, de transférer leur épargne vers un PER à des conditions fiscales avantageuses (abattement dédié sur les plus-values et déduction des sommes transférées des revenus imposables dans la limite de certains plafonds).

Troisième évolution notable: la mise en place de règles de transparence accrues pour les assureurs. Ces derniers auront l’obligation de rendre publics le taux de rendement garanti moyen et le taux moyen de la participation aux bénéfices attribué pour chaque contrat, même pour ceux qui ne sont plus commercialisés! Ils devront les publier sur leur site Internet dans un délai de 90 jours suivant le 31 décembre de l’année de revalorisation et les garder disponibles pendant cinq ans. Cette exigence de transparence s’appliquera aux frais prélevés sur les unités de compte.

La dernière règle imposée aux assureurs concerne la mise en place d’une offre de finance durable dans les unités de compte. Dès 2020, ils devront présenter aux épargnants au moins un fonds labellisé ISR (investissement socialement responsable). Puis en 2022, ils compléteront leur gamme avec une unité de compte verte et une autre solidaire, bénéficiant respectivement des labels TEEC (Transition énergétique et écologique pour le climat) et Finansol.

PEA : assouplissement des règles

La loi Pacte veut redynamiser l’investissement en Bourse. Première décision phare : la création d’un plan d’épargne en actions (PEA) destiné aux jeunes adultes. Cette nouvelle enveloppe permettra aux 18 -25 ans rattachés au foyer fiscal parental, ne pouvant initialement accéder au PEA faute d’être des contribuables à part entière, d’y placer jusqu’à 20.000 euros (somme déduite du plafond parental, le cas échéant). Elle profitera de la même fiscalité que le PEA classique. La mesure a été défendue par la F2iC (Fédération des investisseurs individuels et des clubs d’investissement) qui espère ainsi attirer la jeune génération sur les marchés actions.

Deuxième nouveauté concernant le PEA, le Gouvernement a décidé d’apporter plus de flexibilité en cas de rachats. Aujourd’hui, l’épargnant souhaitant effectuer un retrait avant huit ans est contraint de clôturer son PEA. A partir de huit ans, il lui est possible de procéder à des retraits partiels, mais tout rachat entraîne l’impossibilité de réaliser de nouveaux versements. Désormais, la loi autorisera un retrait dès la cinquième année du plan sans entraîner sa clôture. Et un retrait au-delà de huit ans ne bloquera plus les dépôts ultérieurs. La loi prévoit aussi de fusionner les plafonds du PEA et du PEA-PME. Les épargnants pourront investir jusqu’à 225.000 euros sur ces deux enveloppes. En outre, la liste des instruments éligibles au PEA-PME sera élargie aux titres émis par les plates-formes de crowdfunding (minibons, obligations à taux fixes, titres participatifs).

Epargne salariale: fortes incitations pour les PME

L’Etat vise à doubler d’ici à la fin de l’année prochaine le nombre de salariés de PME couverts par un dispositif d’épargne salariale. Pour tenir les délais, le Gouvernement a déjà réintégré certaines mesures de la loi Pacte dans sa loi de finances pour 2019 votée l’an passé. Le forfait social (charges patronales de 20%) a été supprimé, depuis le 1 er janvier, sur les sommes versées au titre de l’intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés, ainsi que sur l’ensemble des versements d’épargne salariale (intéressement, participation et abondement de l’employeur) pour les sociétés de moins de 50 salariés.

Au-delà de l’incitation fiscale, le Gouvernement facilitera les démarches pour les entreprises par la mise en place d’accords d’intéressement et de participation de branche. L’instauration d’un PEE (plan d’épargne entreprise) ne sera plus obligatoire pour la création d’un Perco (plan d’épargne pour la retraite collectif). L’actionnariat salarié sera aussi stimulé par différentes mesures: décotes relevées, fiscalité assouplie, abondement unilatéral de l’employeur… Enfin, si l’Etat décide de céder les parts qu’il détient dans une entreprise, il devra en réserver 10% aux salariés, mesure qui devrait s’appliquer, par exemple, à la privatisation d’ADP (voir encadré).

Privatisations, cryptomonnaies: de nouvelles opportunités

La loi Pacte renferme une série de mesures plus marginales pour votre épargne. Certaines ont fait grand bruit au sein de la classe politique, comme les annonces de la privatisation d’ADP (ex-Aéroports de Paris) et de La Française des jeux. Si le premier est déjà coté en Bourse, l’opérateur de loterie pourrait, lui, y être introduit. Reste à savoir si les particuliers auront accès à ces deux opérations, l’Etat pouvant en effet décider de leur réserver une partie des actions.

D’autres points concernent des marchés très spécifiques, comme les cryptomonnaies (bitcoin, ether…). L’Etat a décidé de mieux encadrer les levées de fonds avec ces monnaies virtuelles (Initial Coin offering, ICO). Un nouveau cadre juridique a été instauré et l’Autorité des marchés financiers sera chargée de délivrer des visas, qui ne seront toutefois pas obligatoires, aux acteurs souhaitant se financer à travers une ICO.

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Plus étonnant, le Gouvernement a accepté de rendre éligibles, sous conditions, les fonds professionnels spécialisés, dédiés aux investisseurs avertis, à l’assurance vie. Celle-ci pourra plus largement intégrerle non-coté ou les cryptomonnaies, qui viennent aussi d’être autorisées dans ces fonds.