Réforme des retraites: à quoi va servir la conférence de financement ?
Des solutions pour parvenir à l’équilibre du système vont faire l’objet de discussions entre partenaires sociaux et gouvernement. Comme la création d'un "âge d'équilibre" à 64 ans, dont ne veulent pas les syndicats.

A peine confirmée par l’exécutif, la « conférence sur l’équilibre et le financement des retraites » doit se mettre en place rapidement pour résoudre d’ici fin avril une équation complexe, avec des options limitées et un « âge d’équilibre » en suspens.
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Avec qui et quel calendrier ?
Edouard Philippe a proposé que cette conférence « réunisse les partenaires sociaux qui participeront à la gouvernance » du futur « système universel » de retraite. Une formule qui semble désigner a minima les cinq organisations syndicales (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC) et les trois fédérations patronales (Medef, CPME, U2P) représentatives au niveau national.
Presque toutes ont manifesté leur intention d’y participer, seul le leader de la CGT, Philippe Martinez, exprimant un « point de vue personnel » laissant planer le doute: « Qu’est-ce qu’on va aller faire dans une conférence où on ne va pas discuter de tout? »
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D’autres sont susceptibles de les rejoindre, notamment l’Unsa et la FNSEA qui ont pris part aux concertations depuis la genèse de la réforme, voire Solidaires et la FSU, qui ont déploré d’en avoir été tenues à l’écart.
Sous l’égide d’un ancien directeur de l’Agirc-Arrco (la caisse complémentaire des salariés du privé), Jean-Jacques Marette, rompu au dialogue social, les discussions devraient débuter fin janvier, pour se conclure « d’ici la fin du mois d’avril », selon le souhait du Premier ministre.
Quelles pistes sur la table ?
Le gouvernement privilégie la création d’un « âge d’équilibre » à 64 ans, avec un malus pour ceux qui partiraient plus tôt et un bonus pour ceux qui prolongeraient leur carrière au-delà. Un scénario censé permettre 12 milliards d’euros d’économies à terme et qui a le soutien du patronat.
Mais les syndicats y sont opposés et mettent en avant d’autres solutions, à commencer par des hausses de cotisations pour les employeurs ou les hauts revenus (au-dessus de 10.000 euros brut par mois). La CFTC veut « mettre fin aux exonérations » sur l’épargne-retraite individuelle, qui « ne bénéficie qu’aux salariés les plus aisés ».
Problème: le Premier ministre a d’emblée écarté toute « hausse du coût du travail » afin de « garantir la compétitivité de notre économie ». Ce qui sous-entend que d’autres prélèvements devraient diminuer en compensation.
Pas question non plus d’une « baisse des pensions », pour « préserver le pouvoir d’achat des retraités », qui ont déjà protesté contre une hausse de CSG en 2018, puis un quasi-gel de leurs revenus en 2019. Deux vetos qui rendent l’équation plus complexe, mais pas insoluble: un recours au Fonds de réserve des retraites (FRR), suggéré par l’Unsa, pourrait combler une partie du déficit attendu.
Le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, ne souhaite « pas qu’on pioche » dans ce trésor de guerre de 36 milliards d’euros mais n’exclut pas « qu’on prenne éventuellement les intérêts » générés par leur placement sur les marchés financiers.
Autre solution avancée par l’Unsa: quand le « trou de la Sécu » aura été remboursé, en 2024, près de 20 milliards de recettes fiscales (CSG et CRDS) seront disponibles et une partie pourrait être réorientée vers les retraites.
Que devient l’âge pivot ?
Il ne disparaît pas du texte, puisque « le projet de loi prévoira que le futur système universel comporte un âge d’équilibre », a prévenu le Premier ministre. En revanche, « la mesure de court terme (…) consistant à converger progressivement à partir de 2022 vers un âge d’équilibre de 64 ans en 2027 » sera gommée de l’article 56 bis du texte transmis au Conseil d’État et aux caisses de sécurité sociale.
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A la place, le gouvernement inscrira « une habilitation large lui permettant de prendre par ordonnance toute mesure permettant d’assurer l’équilibre du système de retraite à l’horizon 2027 ».
Si un compromis se dégage d’ici fin avril, un amendement « transcrivant cet accord dans la loi » sera introduit « lors de la seconde lecture » au Parlement. Dans le cas contraire, M. Philippe a prévenu qu’une fois « éclairé par les travaux de la conférence », il prendrait « les mesures nécessaires ».