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Réforme des retraites : le calendrier des travaux est -il respecté ?

Quand la réforme des retraites doit-elle être dévoilée ? Votée ? Quand entrerait-elle en vigueur ? Qui serait concerné ? Le point sur l'agenda prévu, pour l'instant...

retraites
crédit : iStock

Remplacer les 42 régimes existants par un système de retraite universel où « un euro cotisé donne les mêmes droits, quel que soit le moment où il a été versé, quel que soit le statut de celui qui a cotisé ». C’est la promesse de campagne d’Emmanuel Macron. Ce que cela signifie, concrètement ? Un haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, a été nommé en septembre 2017 pour mener les travaux préparatoires et régler les innombrables « détails » de ce chantier titanesque !

Concertations jusqu’à mi-mai

Où en est-on ? Si les grandes lignes du projet ont été présentées en octobre, la concertation sociale continue depuis. Environ une semaine sur deux, les équipes du haut-commissariat consultent les partenaires sociaux sur des thématiques précises – âge de la retraite, transition, pilotage du futur système, régimes spéciaux, etc.

Les concertations des syndicats doivent courir jusqu’à mi-mai. Avec des questions encore très sensibles à traiter. Qui pilotera le futur système et comment sera-t-il organisé ? La question de la gouvernance fera l’objet de pas moins de deux semaines de discussions. Une autre série de séances sera consacrée à l’inépuisable sujet de l’avenir des dispositifs de solidarités, ces droits « gratuits » à la retraite accordés en cas de chômage ou de maladie, ou encore ces minimums de pensions servis à ceux qui ont cotisé toute leur carrière sur de petits revenus. Le sujet explosif des pensions de réversion reviendra aussi sur la table la première semaine d’avril.

Il sera enfin question début mai d’un thème peu évoqué jusqu’ici mais clé dans l’optique d’une modernisation du système : la transition entre l’emploi et la retraite. Les dispositifs de cumul emploi-retraite et retraite progressive devraient être examinés.

Fin du suspense en juin ?

Les équipes du haut-commissaire ont en outre prévu de poursuivre dans les semaines à venir les concertations des représentants des professions libérales et de rencontrer certains publics spécifiques, comme les militaires et les pêcheurs. Des réflexions sont aussi en cours sur les droits à la retraite des micro-entrepreneurs et des jeunes (acquisition de points durant les stages, etc.).

Le haut-commissaire affirme qu’il sera prêt pour présenter son projet juste après les élections européennes, donc probablement début juin. Quant à l’examen du texte au Parlement, il est toujours prévu d’ici à fin 2019. Si ce calendrier était tenu, la réforme entrerait en vigueur en 2025, selon les dernières annonces, et les générations concernées seraient celles nées en 1963 ou après (sauf exceptions). Interrogée dimanche sur RTL, la ministre de la Santé et des Solidarités Agnès Buzyn a confirmé que « pour l’instant », ce calendrier n’était « pas remis en cause », estimant qu’il s’agissait d’une « réforme profondément sociale et égalitaire ».

Un planning à prendre toutefois avec des pincettes… « Etre prêt en juin suppose d’avoir réussi à trancher dans les dix semaines à venir une multitude de questions qui semblent toujours en suspens, donc d’avancer très vite sur les arbitrages« , note l’économiste spécialiste des retraites Philippe Crevel.

Un planning tendu

Sans compter que le parcours d’un projet de loi, de son élaboration à la promulgation, est long… Une série d’étapes sont incontournables et certains délais en règle générale incompressibles. Une fois rédigé, l’avant-projet devra par exemple être soumis à l’avis du Conseil économique, social et environnemental. Puis présenté au Conseil d’Etat. Pour pouvoir seulement après être présenté en conseil des ministres et déposé au Parlement. Dans chacune des deux assemblées, le texte devra être examiné en commissions avant d’être discuté, amendé et voté en séances publiques.

« Le hic, c’est que l’agenda parlementaire est toujours déjà chargé les derniers mois de l’année en raison de l’examen des projets de lois budgétaires« , souligne Philippe Crevel. « Bref, c’est chaud !« , résume-t-il. Tout cela dans un contexte politique et social tendu, avec un éventuel remaniement ministériel au menu et des incertitudes liées à l’impact des résultats des européennes.

 « Certes, l’examen au Parlement pourra toujours déborder sur 2020, mais pas au-delà de mi-février, car en mars ce sera les élections municipales« , poursuit Philippe Crevel. « S’ils tardent, le débat sur la réforme pourrait se retrouver pris en otage durant la campagne. Ce serait risqué : de nombreux sujets sont explosifs et le socle de population en faveur du régime universel n’est pas si solide. Quant à reporter au second semestre de 2020, c’est se rapprocher dangereusement de la présidentielle de 2022…« 

Le gouvernement semble donc coincé par le temps. « Surtout, il n’a pas  le droit à l’erreur« , ajoute l’économiste. « S’il échoue à mener à bien ce projet clé, dans le contexte des gilets jaunes, cela sonnera comme un aveu d’échec, et on voit mal comment il pourra encore faire passer quoi que ce soit d’important jusqu’à la fin du quinquennat. Il est condamné à avancer.« 

Débats et… escape game !

Vous vous intéressez à la réforme ? Une série d’événements ouverts au public sont prévus d’ici à fin avril, notamment un colloque organisé par le Sénat ce jeudi 21 mars sur le thème « la parole aux partenaires sociaux » (programme et inscription ici). Et quatre débats auront lieu à Orléans (29 mars), Niort (5 avril), Montpellier (9 avril) et Nancy (24 avril) à l’initiative de la Fondation Jean Jaurès et de la Fondation pour l’innovation politique (programme et inscription ici).

De passage à Toulouse ? Insolite : la députée LREM Corinne Vignon, qui préside un groupe de travail sur la réforme à l’Assemblée nationale, a mis sur pied dans les locaux de sa permanence… un escape game ! L’idée : par équipe, résoudre des énigmes sur le système de retraite et retrouver la clé du placard où est rangé le projet de réforme, en une demi-heure maxi. Des créneaux pour avril et mai (gratuits, sur réservation) devraient être bientôt annoncés sur le site de l’élue. Ni testé, ni approuvé par la rédaction, mais racontez-nous si vous tentez !