Le paiement en quatre fois sans frais, un risque de surendettement ?
Decathlon, Fnac-Darty, Leroy Merlin… Tous les grands distributeurs se sont mis au paiement fractionné. Une pratique qui pourrait pousser au surendettement.

Depuis quelques temps, de nouvelles facilités de paiement séduisent de plus en plus les commerces et les clients. Dorénavant, il n’est plus nécessaire de remplir des documents à n’en plus finir, seulement quelques clics suffisent pour fractionner un paiement par carte bancaire en l’étalant sur moins de trois mois. En France, 50% à70 % des commerçants en sont déjà équipés ou sont en train de le faire, selon le cabinet de conseil Bain, relayé par Le Figaro. C’est 80% en Angleterre. « Le paiement fractionné s’impose comme un prérequis pour les commerçants qui vendent en ligne», précise Ada di Marzo, directrice générale du bureau de Bain & Company à Paris.
C’est « un peu comme la carte bleue dans les taxis », affirme Marc Lanvin, le directeur général adjoint de Floa, l’un des leaders de ce marché. « Ceux qui ne la proposent pas déçoivent les clients. Ces derniers se sont habitués à en bénéficier. Ils veulent savoir tout de suite s’ils peuvent s’offrir un bien ou non ». Pour le client, ces nouveaux systèmes sont la plupart du temps gratuits. Les commerçants prennent alors en charge la commission facturée par les entreprises spécialisées comme Klarna, Alma, Floa ou encore Oney en France.
En France, seuls 4% à 5% des paiements sont fractionnés
Decathlon, Fnac-Darty, Leroy Merlin… aucun n’y échappe. « Nous voulons offrir un maximum de solutions de paiement à nos clients, déclare-t-on chez Leroy Merlin. Ils sont de plus en plus jeunes, et friands de ce service. Nous devons le proposer ». Les petits commerçants suivent les gros. « Le paiement fractionné accélère la digitalisation des petits commerces, explique Ada di Marzo. La plupart des clients des start-up du secteur comme Klarna sont des PME ou des TPE ».
Selon les prestataires de paiement, les commerçants voient leur chiffre d’affaires progresser de 15% au minimum. De plus, en période d’inflation, le paiement fractionné est un parfait outil « pour relancer la consommation », assure Julien Maldonato, associé chez Deloitte.
Pourtant, en France, seuls 4% à 5% des paiements sont fractionnés, contre 20% à 25% dans les pays nordiques. « Le paiement fractionné est né sur Internet, mais les clients souhaitent aussi en bénéficier dans les magasins physiques », précise Jean-Pierre Viboud, le PDG d’Oney. Le paiement fractionné se développe aussi progressivement dans de nombreux secteurs. Dans le tourisme, Center Park ou Lidl voyages ont déjà inclus l’option. Concernant la santé, le paiement de lunettes ou de prothèses auditives peut s’effectuer par ce dispositif.
Bruxelles s’inquiète d’un surendettement
Cependant, un problème est à souligner : lorsqu’ils sont d’un montant inférieur à 200 euros ou d’une durée inférieure à trois mois, ces crédits ne sont pas considérés comme étant du crédit. Par conséquent, les obligations entourant le prêt traditionnel comme le taux d’usure au-delà duquel ils sont interdits de prêt, ne peuvent pas s’appliquer légalement.
De son côté, Bruxelles s’inquiète que ces pratiques incitent les ménages au surendettement. Et voudrait faire entrer le « petit » paiement fractionné dans le giron du crédit traditionnel, à l’occasion de la révision de la directive paiement datant de 2008. Dès cet été, le texte devrait être discuté au Parlement européen. À Bercy, un consensus se dégage pour un encadrement « allégé par rapport aux règles de droit commun ».